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Arnaud Cretot (NéoLoco) : « Faire du pain à l’énergie solaire ... la preuve qu’un autre modèle est possible »
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07 novembre 2024
- Julie Hervault - Temps de lecture 3 min
NéoLoco, c’est une boulangerie solaire et une activité de torréfaction solaire, mais pas que ! NéoLoco, c’est aussi un laboratoire d’expérimentation, dans des conditions réelles, d’un autre modèle de société.
Plutôt que de chercher à dominer la nature, au risque de la dérégler, pourquoi ne pas se mettre à son rythme ? C’est tout le pari fait par Arnaud Cretot, fondateur de NéoLoco en 2018. Un pari tout sauf fou. Rencontre avec un homme de 36 ans qui a la tête sur les épaules, et de la suite dans les idées.
Naissance d’une boulangerie solaire : NéoLoco
Vous êtes installé en Normandie, à Montville, à quelques kilomètres au nord de Rouen, où vous faites du pain au four solaire et où vous développez une activité de torréfaction, elle aussi solaire. Comment en êtes-vous arrivé là ?
Arnaud Cretot : j’ai fait une école d’ingénieur, à Nantes. J’ai toujours eu, en moi, cette certitude que les innovations technologiques devaient aider à trouver des solutions nouvelles aux problèmes sociétaux. Nous étions au début des années 2010 et l’on commençait à parler des enjeux climatiques et environnementaux. Pendant une année, auparavant, j’avais réalisé un voyage d’études, dans une vingtaine de pays dans le monde, pour voir, in situ, comment des cultures différentes pouvaient appréhender la question énergétique.
C’est à cette occasion que j’ai rencontré les équipes de Solar Fire (aujourd’hui Lytefire, Ndlr) en Inde, qui réfléchissait à des solutions techniques pour construire des fours solaires, afin de pouvoir les proposer aux populations vulnérables. C’est comme cela que je me suis intéressé à cette question, cruciale, de la place de l’énergie dans nos sociétés. De fil en aiguille, je suis devenu directeur technique chez Solar Fire, avec des missions, notamment en Afrique, pour y implanter des fours solaires. J’ai commencé à faire du pain, vers 2017, pour être encore plus légitime dans ce que je disais et acquérir tous les savoir-faire qui me permettraient de pouvoir parler des choses encore plus concrètement. Puis j’ai réfléchi à la torréfaction car j’accompagnais alors un groupe de femmes qui torréfiait des cacahuètes au Kenya. Je me suis dit qu’il y avait de grandes choses à faire avec cette technique et c’est ainsi qu’est née NéoLoco.
Une torréfaction à l’énergie solaire
Comment cela fonctionne concrètement et que faites-vous exactement ?
Arnaud Cretot : évidemment, si je m’intéresse à la torréfaction et que je m’installe en Normandie pour le faire, ce n’est pas pour torréfier des graines venant du bout du monde. Je veux travailler avec des productions locales et retrouver, via cette technique de la torréfaction, un usage alimentaire qui a longtemps été ultra-courant, mais que l’on a ensuite trop souvent oublié, au profit du goût standardisé d’une production industrielle. En Normandie, nous avons du lin : nous pouvons en faire des épices. Ce sont toutes ces saveurs locales que l’on cherche à remettre au goût du jour avec NéoLoco. Nous torréfions tout un tas de graines locales, lentilles et pois chiches notamment. Nous faisons, avec ce dernier, non pas un café, mais ce que l’on appelle « l’éveil résistant ». Testez, vraiment, vous verrez à quel point c’est bluffant. Et tout ça est torréfié uniquement à l’énergie solaire, bien sûr.
Four solaire ou four au feu de bois ?
Et pour la partie boulangerie solaire, c’est le même principe ?
Arnaud Cretot : c’est le même principe, oui. L’activité torréfaction représente environ 60 % de nos ventes, via notre site de vente en ligne et via les épiceries, magasins bio et restaurateurs qui écoulent nos produits. Nous proposons une gamme assez large, parce que j’aime explorer plein de choses différentes et tester, encore et encore. L’idée est de développer des alternatives aux produits du bout du monde. Nous avons aussi bien des boissons chaudes que des graines pour l’apéro ou des articles de confiserie ou pour le petit-déjeuner. Pour le pain, c’est le même état d’esprit qui nous anime. La seule différence, c’est qu’il n’est pas forcément 100 % solaire parce que nous avons des jours de production fixes et que, bien sûr, quand il ne fait pas beau, nous ne pouvons pas utiliser le four solaire. Un four au feu de bois prend alors le relais. Mais la clé c’est, autant que possible, de s’adapter aux conditions météos du jour. Cela implique de réfléchir à une autre manière d’organiser son travail et son entreprise. Nous utilisons ainsi les préceptes de la méthode Teled, acronyme de « tâches énergivores lorsque l’énergie est disponible », et qui vise à s’adapter à un accès intermittent aux ressources. En gros, en Normandie, nous avons 40 % de probabilité de beau temps dont nous pouvons faire plus d’un tiers de notre production de pain en 100 % solaire. Ailleurs, dans d’autres régions plus ensoleillées, ce ratio peut monter plus haut. Une dizaine d’artisans, déjà venus se former ici, travaillent un peu partout en France avec l’énergie solaire.
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